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GAFAM contre DMA: Un Combat pour le Contrôle du Numérique

GAFAM contre DMA: Un Combat pour le Contrôle du Numérique

Le 6 mars dernier a marqué la fin du délai de mise en conformité à la Législation sur les marchés numériques, ou Digital Markets Act (DMA). Cette réglementation européenne, entrée en vigueur en mai 2023 a pour objectif de garantir des marchés numériques équitables et ouverts.

Mais face à ces nouvelles règles, comment les géants du numérique ont-ils réagi ? Ont-ils véritablement fait les efforts nécessaires pour se conformer au DMA ? Et comment la Commission européenne compte-t-elle faire respecter sa réglementation face aux résistances avérées ? Ces interrogations sont au cœur des débats actuels. Dans cet article, nous allons explorer ces enjeux en détail, dans un contexte marqué par une tension et une inquiétude grandissantes.

Qui sont les Gatekeepers visés par la DMA ?

Google, Amazon, Meta, Apple et Microsoft, les GAFAM sont régulièrement critiqués pour leur utilisation des données personnelles et pour favoriser leurs propres services et abuser de pratiques anticoncurrentielles. Ces problèmes sont précisément ceux que le DMA vise à résoudre.

Cependant avant tout, pour être considérés comme des “contrôleurs d’accès” ou “Gatekeepers” au sens du DMA, ces acteurs doivent répondre à des critères précis :

  • Ils doivent être actifs dans plusieurs pays de l’UE et avoir un impact significatif sur le marché. Ils présentent une puissance économique importante, avec un chiffre d’affaires annuel minimum de 7,5 milliards d’euros en Europe sur les trois dernières années. Leur capitalisation boursière doit également atteindre au moins 7,5 milliards d’euros.
  • Avec plus de 45 millions d’utilisateurs européens actifs par mois ou bien 10 000 professionnels par an, ils doivent occuper une position d’intermédiation forte et détenir et durable sur le marché.

Obligations et interdictions du DMA

Le DMA impose donc aux Gatekeepers un certain nombre d’obligations et d’interdictions.

Parmi les obligations, on peut citer:

  • Donner aux entreprises utilisatrices de ces plateformes en ligne l’accès aux données générées par leurs activités,
  • Fournir aux entreprises qui font de la publicité sur ces plateformes les moyens et informations nécessaires pour réaliser leurs propres vérifications indépendantes,
  • Autoriser les entreprises utilisatrices à promouvoir leurs offres et à conclure des contrats avec leurs clients en dehors de ces plateformes,
  • Offrir aux jeunes entreprises de nouveaux outils pour affronter la concurrence sans être soumises à des clauses et conditions abusives limitant leur développement,
  • Garantir aux consommateurs un plus grand choix de services de meilleure qualité, plus de possibilités de changer de fournisseur s’ils le souhaitent, un accès direct aux services et des prix plus équitables.

Quant aux interdictions, les ‘gatekeepers’ ne peuvent plus :

  • Favoriser leurs propres services et produits en termes de classement par rapport à ceux proposés par des tiers sur leur plateforme,
  • Empêcher les consommateurs d’accéder aux services d’entreprises en dehors de leurs plateformes,
  • Suivre les utilisateurs finaux en dehors de leur service de plateforme essentiel à des fins de publicité ciblée, sans qu’un consentement effectif ait été donné.

Ces obligations visent à créer un environnement commercial plus équitable pour les entreprises utilisatrices, à offrir aux consommateurs un plus grand choix de services de meilleure qualité et à des prix plus équitables. Il reste donc à voir comment la Commission européenne garantira que le DMA suit l’évolution rapide du secteur numérique. 

Application du DMA et rôle de la Commission européenne

Le rôle de la commission européenne

La Commission européenne joue donc un rôle crucial dans l’application du DMA. Elle est chargée de mener des enquêtes de marché pour désigner les entreprises comme contrôleurs d’accès. En effet, lorsque l' entreprise est désignée comme potentielle GataKeepers, la Commission dispose d’un délai de 45 jours ouvrables pour adopter une décision désignant ce status spécifique. Une fois désignées comme GateKeepers, les entreprises visées disposent de 6 mois pour se conformer à la législations.

Conséquences du non-respect du DMA

Le non-respect du DMA peut entraîner des sanctions sévères, y compris des amendes pouvant aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires annuel mondial total de l’entreprise. En cas de récidive, les amendes peuvent atteindre jusqu’à 20 % du chiffre d’affaires.En outre, si les ‘gatekeepers’ violent de façon répétée les obligations imposées par le DMA, la Commission est en mesure de leur infliger des mesures correctives supplémentaires. Ces mesures correctives devront être proportionnées à l’infraction commise. Si nécessaire et en dernier recours, des mesures correctives non financières peuvent être imposées, telles que la cession (de parties) d’une activité.

L’impact du DMA

Le DMA prévoit que les géants du numérique proposent leurs propres solutions. Ces derniers ont effet déjà effectué des ajustements majeurs pour se conformer à la réglementation.

  • Apple a annoncé qu’elle permettrait l’accès à des magasins d’applications alternatifs sur ses appareils. La firme à la pomme a cependant présenté les directives du DMA comme une menace pour la sécurité, utilisant 22 fois le mot “risque”. Elle a également mis en place un système complexe de certifications, de restrictions et de frais supplémentaires pour dissuader les entreprises de proposer des magasins d’applications alternatifs.
  • Amazon sollicite toujours l’accès aux données personnelles en utilisant des catégories vagues, sans préciser les services spécifiques concernés. De plus, le message affiché par Amazon aux consommateurs met l’accent sur l’amélioration du service pour ceux qui acceptent d’être pistés, sans mentionner qu’il utilisera aussi leurs données personnelles pour la publicité ciblée.
  • Google a dû également faire des ajustements significatifs. L’entreprise a ouvert davantage son moteur de recherche pour afficher, à côté de ses propres services de comparaison, ceux de concurrents. Le “Consent Mode V2” vise par ailleurs à donner aux utilisateurs plus de contrôle sur leurs données personnelles. Les entreprises utilisant ces services doivent donc mettre en œuvre ce nouveau mode de consentement pour se conformer aux exigences du DMA.
  • Microsoft permettra de désinstaller ses services Bing, Edge, Photos ou Cortana de son système d'exploitation Windows. Des demandes de consentement similaires seront émises par Microsoft pour ses services publicitaires.

Il ne fait pas de doute que ces mises à jour, implémentées dans un contexte particulièrement tendu, pourraient conduire à une application minimale si les autorités ne jouent pas pleinement leur rôle de régulateur. En effet, on peut craindre que les entreprises ne cherchent qu’à contourner les règles en utilisant des interfaces trompeuses ou en détériorant la qualité du service pour sanctionner les consommateurs qui souhaitent bénéficier de ces nouvelles règles. Les premières propositions d’Apple ont par ailleurs déjà suscité une vive contestation.

Aussi, bien que la Commission européenne soit déterminée à appliquer le texte, celle-ci est elle-même mise en garde contre le risque que l’application du DMA permette cependant trop de possibilités de recours à des géants du numérique tentés de jouer la montre. La mise en œuvre du DMA s’apparente à un véritable bras de fer entre les intérêts des géants du numérique, la Commission européenne qui joue ici sa crédibilité, ainsi que les intérêts des entreprises et des utilisateurs.

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